Les
partis au pouvoir ont toujours eu besoin de relais médiatiques complaisants
dont la principale mission consiste à promouvoir leur image auprès de la
population tout en fustigeant leurs adversaires politiques.
Du
temps de Bourguiba, cette fonction était notamment assurée par le journal L’Action
qui relayait les activités du combattant suprême avec zèle et abnégation. Avec
l’arrivée de Ben Ali, la désinformation s’est encore accentuée et a pris une
tournure plus professionnelle puisqu’en plus du journal Le Renouveau organe
officiel du parti unique et du régime, l’omnipotente ATCE a constitué, sous
l’égide du petit Goebbels que fut Abdelwahab Abdallah, une formidable machine
de propagande qui a fonctionné à plein régime aussi bien en Tunisie qu’à
l’étranger.
Cependant
l’expérience tunisienne en matière de démagogie journalistique et de
manipulation des masses aussi pittoresque soit-elle, demeure néanmoins
anecdotique si on la compare avec l’expérience soviétique. En effet, le parti
communiste a réussi durant des dizaines d’années à exercer un contrôle absolu
sur tous les médias et a su déployer un arsenal journalistique imposant dont la
Pravda était le fer de lance.
Ce
journal qui était aussi important pour le régime que la police politique,
servait à redorer l’image de l’union soviétique en usant de tous les moyens
possibles et imaginables. Ainsi, il paraît que c’est dans l’enceinte de la
Pravda que fut inventé le photomontage politique (ancêtre du Photoshop) afin de
faire disparaître des photos officielles les membres du parti tombés en
disgrâce ou pour embellir l’image de certains dirigeants. Toutes les mauvaises
nouvelles se muaient, sous la plume des journalistes de la Pravda, en
événements heureux et réjouissants. Toute critique du régime était débusquée et
son auteur accablé des pires insultes.
Cette
manière infâme de faire du journalisme qui a influencé les torchons publiés
dans les pays dictatoriaux du tiers monde continue de faire des émules sous nos
cieux. Ainsi, des sites internet, qui jusqu’à récemment ne rechignaient pas à
publier les articles d’un certain Borhan Bsais, se sont transformés du jour au
lendemain en défenseurs zélés des nouveaux maîtres du pays. Les journalistes
(si tant est qu’on puisse les qualifier ainsi) opérant sur ces sites ne font
pas dans la demi-mesure puisqu’ils affichent sans vergogne un ralliement
indéfectible au parti islamiste.
Pire
encore, ces sites n’hésitent pas à dénoncer avec virulence et en usant parfois
d’un langage ordurier les prises de positions des partis politiques
progressistes ou de certaines associations de la vie civile à l’instar de celles
des femmes démocrates.
Il
est tout de même désolant de constater que les vents de la révolution n’ont pas
encore soufflé dans certaines rédactions et que certains pseudos journalistes
continuent à ignorer la déontologie de leur profession qui exige d’eux
l’observation d’un degré minimum d’impartialité. Les lecteurs qui seraient
tentés de fermer les yeux sur ce genre de comportements perfides devraient
peut-être se souvenir que la dictature est toujours le fruit de la lâcheté et
de la complaisance.
4 commentaires:
Nous avons fabriqué ben ali de toutes pièces, nous allons en faire autant (tous et pas que les journalistes), sauf que cette fois, le résultat sera pire
@Anonyme
Je partage votre pessimisme.
En effet. C'est malheureux, mais c'est ainsi.
Ce qui qualifie le plus nos journalistes, c'est la 9offa.
Ce que tu écris à propos des journalistes soviétiques, et d'ailleurs de nos chers administrateurs de page facebook depuis quelques temps me rapelle le livre 1984 de Georges Orwell. Quelle était donc la profession du personnage principal du livre?
@Massir
Le Big Brother intégriste est encore plus dangereux que celui d'Orwell Car il n'y a pas pire qu'un totalitarisme qui tire sa légitimité de l'instrumentalisation du sacré.
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