dimanche 27 novembre 2011

Au pays des aveugles médiatiques Attounissia TV est reine


Il ne fait aucun doute que Sami Fehri a été l’un des auxiliaires des Trabelsi est plus précisément de Belhassen Trabelsi le parrain de la bande des tripolitains étant donné que les deux compères étaient associés au sein de la célèbre société de production Cactus Prod.

Est-ce que l’animateur producteur ouvreur de boîtes a profité de manière frauduleuse de cette association avec le mafieux bedonnant ? A cette question seule la justice tunisienne peut répondre d’ailleurs mon présent post ne s’intéresse pas au volet judiciaire de l’affaire Cactus puisque l’instruction est encore en cours.

En vérité, j’ai eu envie d’écrire sur Sami Fehri en regardant hier l’émission « Labes » qu’il réalise sur sa chaîne Attounissia (et oui j’ai des samedis soir palpitants). Le format de l’émission est certes copié sur celui des shows américains mais j’avoue que c’est une réussite. Le ton est léger, les questions de l’animateur (qui soit-dit en passant n’a pas été gâté par la génétique) sont « souvent » pertinentes, et même les petits interludes comiques se laissent regarder. Bref, j’ai eu du mal à décrocher avant la fin. Bien entendu le niveau n’est pas celui d’un Jay Leno ou d’un David Letterman show, mais pour une production tunisienne le résultat n’est pas mal du tout.

Attounissia TV semble avoir fait du recyclage télévisuel une spécialité puisqu’une autre émission de la chaîne est la copie conforme du « Faites entrer l’accusé » de France 2 mais là aussi l’ex-animateur de RTCI a su trouver la bonne formule car l’émission est captivante et franchement regarder un fait divers tunisien à la sauce « Faites entrer l’accusée » s’est révélé être une expérience jouissive.

Personnellement je n’ai jamais apprécié Sami Fehri mais je ferais preuve de malhonnêteté en dénigrant les efforts que lui et ses équipes déploient pour présenter des émissions potables notamment si on les compare avec les merdes monumentales qui sont programmées sur les autres chaînes tunisiennes.

Je suis même persuadé que la révolution a fait du bien à Sami Fehri et à ceux qui travaillent avec lui puisque depuis qu’ils sont obligés de composer avec les moyens du bord, je constate que l’adaptation des concepts étrangers est réalisée avec une minutie qui relève presque d’une sorte d’artisanat télévisuel alors qu’auparavant ils se contentaient de balancer sur les ondes des productions Endemol entrecoupées de spots publicitaires vantant les mérites de tel ou tel produit laitier.

Enfin et au risque de choquer certains, je dirais que le jour où on procédera à l’analyse des causes profondes de la révolution tunisienne, les feuilletons « bling-bling » de Sami Fehri seront cités parmi les facteurs déclencheurs du soulèvement tunisien (à titre marginal bien entendu). En effet, je suis persuadé que l’étalage à une heure de grande écoute de la vie outrageusement fastueuse et « dissolue » d’une partie de la bourgeoisie et des nouveaux riches tunisiens a exacerbé le sentiment d’injustice et de misère ressenti par beaucoup de nos concitoyens notamment ceux vivant dans les régions intérieures. Les gens étaient habitués durant le Ramadan à regarder des productions télévisuelles d’inspiration rurale style « Douar » ou ayant pour cadre les quartiers populaires et la médina et voilà qu’on leur montre des voitures luxueuses, des parties de jambes en l’air et des villas à un million de dinars.

Si mon constat s’avérait juste, Sami Fehri aurait ainsi contribué inconsciemment à causer sa propre perte ou son renouveau (qui sait ??).



2 commentaires:

Fatma a dit…

L'apport éventuel de Sami Fehri à l'amélioration et la modernisation du paysage audiovisuel tunisien, aussi encourageant et rafraîchissant soit-il, ne pourra jamais occulter ses erreurs passées. Il a délibérément pactisé avec le diable, et en passant, s'en ai mis plein les poches. Cependant, comme vous le dîtes, seule la justice est apte à le juger. Concernant les feuilletons ramadanesques, il est vrai que les sujets traités ne sont pas représentatifs de la majorité de la société tunisienne, mais malgré tout, cette tranche de la population, à savoir la jeunesse dorée dans toute sa décadence, est une réalité dans notre société, même si elle reste minoritaire. Je ne vois aucun problème à ce qu'elle soit le sujet d'un feuilleton, cependant, il aurait fallu diversifier les sujets, et non pas nous resservir trois années de suite le même scénario ( Maktoub 1, Maktoub 2, Casting ... ) De toutes les façons,je ne pense pas que les jeunes défavorisés aient attendu qu'on leur renvoie l'absurdité de leur misérable et triste existence au visage ( quoiqu'à mon humble avis, la vie de la jeunesse dorée est toute aussi triste et absurde ) à travers un feuilleton, pour trouver le courage et la force nécessaire de se révolter contre un régime de 23 ans au nom de la liberté et de la dignité.

Ecrits-anonymes a dit…

@fatma
Je partage votre analyse cependant je me permets d'apporter deux précisions à certaines de vos remarques. Tout d'abord je n'ai nullement critiqué les sujets des feuilletons made in Cactus. Peu importe selon moi les thèmes abordés dans une œuvre artistique ce qui compte c'est la manière avec laquelle cela est fait (sur ce point il y aurait beaucoup à dire au sujet des feuilletons fhéro-trabelsiens).

Ensuite, certes j'ai émis l'hypothèse que le choc des images bling-bling a pu être un des facteurs déclencheurs du soulèvement tunisien, mais j'ai pris le soin de préciser qu'il s'agit d'un facteur marginal même si je continue à croire que la télévision en tant que comosante importante de la cultutre populaire a un impact indéniable sur l'inconscient collectif d'une nation. Cet impact est encore plus certain en Tunisie notamment au vu des audiences télévisuelles ramadanesques.