jeudi 17 novembre 2011

Mea culpa

Durant les vingt-trois années du règne de Ben Ali, qui a débuté alors que j’avais huit ans, je n’ai jamais participé à une manifestation, ni signé de pétition, ni dénoncé de quelle que manière que ce soit le moindre dépassement ou atteinte aux droits de l’Homme. Certes, je n’ai pas non plus pris part aux campagnes d’encensement du régime et je n’ai adhéré à aucun parti politique ou association de la vie civile (même pas les scouts).

La seule fois de ma vie où je suis allé voter, ce fut pour soutenir un camarade qui se présentait en tant qu’indépendant aux élections du conseil scientifique de l’université et dont le slogan de campagne était : « élisez-moi pour avilir le conseil ». D’ailleurs au grand dam des étudiants rcédistes il a réussi à obtenir un score fort honorable, une sorte de Aridha avant l’heure en quelque sorte.

Durant ces années de plomb, la vie politique française m’intéressait beaucoup plus que son homologue tunisienne (par ailleurs inexistante) et je n’aurais manqué sous aucun prétexte, les grands débats politiques post électoraux même s’il s’agissait d’élections régionales ou cantonales.

La peur de la répression policière était tellement paralysante que j’évitais dans mon blog ainsi que dans mes interventions publiques d’aborder le moindre sujet à caractère politique. L’autocensure était devenue chez moi une seconde nature et même après la révolution, je n’ai pas pu me défaire de mes vieux réflexes pavloviens. Je suis comme ce prisonnier qui ayant passé de longues années derrières les murs du pénitencier, se surprend encore, après sa libération, à regarder derrière lui pour voir s’il n’y a pas un gardien hostile qui surveille tous ses faits et gestes.

Je dois également avouer qu’étant par nature pessimiste, j’ai encore du mal à croire que notre chère Tunisie s’achemine vers un vrai régime démocratique respectueux des libertés et des droits individuels. Il me semble, mais j’espère me tromper, que la période transitoire que nous sommes en train de vivre n’est qu’une parenthèse enchantée qui précède une longue nuit obscure.

Cependant je ne veux absolument pas céder au défaitisme c’est pourquoi ces derniers temps je ne cesse de me remémorer les paroles adressés par l’un des compagnons du prophète aux membres de sa tribu alors qu’ils voulaient abjurer la nouvelle religion profitant de la mort de l’envoyé de dieu. Ce compagnon leur avait ainsi dit : « oh mes frères ne soyez pas les derniers à vous être convertis et les premiers à afficher votre apostasie. » Moi non plus je ne veux pas être le dernier à m’être libéré et le premier à accepter le joug d’une nouvelle dictature infâme quelle que soit d’ailleurs son origine.

1 commentaire:

Fatma a dit…

Je me reconnais beaucoup dans votre article, mais malgré tout, la vie est faite de choix et essayer de vivre sa vie du mieux que possible dans un pays ou règne une dictature n'est pas un signe de lâcheté, ce n'est pas parce qu'on n'exprime pas de façon ostentatoire son aversion pour le régime en place qu'on s'en accommode, parfois on essaye juste de préserver le peu de liberté qu'il nous reste, et comme le dit si bien le proverbe : " Eli fel 9alb fel 9alb."
J'aime beaucoup vos articles, ils sont incisifs, plein de finesse et de justesse, et surtout très drôles. Postez plus souvent et soyez optimiste !